Page 21 - 1689-1760 Registre journalier des malades de l'Hotel-Dieu de Québec
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REGISTRE JOURNALIER DES MALADES DE L’HÔTEL-DIEU DE QUÉBEC 1689-1760
L'Hôtel-Dieu offre un régime alimentaire relativement à l'abri de la conjoncture économique. La
gamme des produits utilisés est diversifiée. Le blé occupe le premier rang de la consommation de
céréales. Parmi les viandes, le boeuf est privilégié. La volaille, le gibier et le gibier à plumes, le
poisson, cette denrée des jours maigres, font partie du menu. Il faut ajouter les produits laitiers
(lait et fromages), les oeufs, les légumineuses, les fruits et les légumes pour avoir un portrait exact
du contenu de l'assiette du malade.
L'hôpital n'est pas seulement le lieu où l'on soigne le corps malade, mais c'est aussi, et surtout, un
lieu de prédilection pour le traitement de l'âme. Pour ce faire, des prières sont récitées tous les
matins et tous les soirs devant l'autel de la salle distinctement et à haute voix afin d'apprendre aux
pauvres à prier Dieu. Le matin, pendant qu'une religieuse récite les prières, de l'eau bénite est
donnée. Le quart d'heure d'instruction religieuse ne doit jamais être omis. Les Hospitalières
doivent aussi veiller à ce que le chapelain visite les malades une fois par jour et que ceux-ci se
confessent et communient. Elles doivent faire en sorte qu'aucun décès ne survienne sans que le
malade ne se soit confessé et ait « reçu le S. Viatique, & l'Extreme-Onction ». Au moment de la
communion générale, qui a lieu les jours de fêtes et les premiers dimanches de chaque mois,
l'Hospitalière doit veiller à ce que l'atmosphère soit empreinte de solennité et que les salles soient
plus propres et mieux ornées qu'à l'habitude, « faisant courrir d'une nappe blanche, un costé du
balustre de l'Autel pour les pauvres convalescentes, & l'autre pour les personnes vertueuses qui
auroient devotion de communier avec elles »46.
Tout concourt à créer dans l'hôpital une atmosphère propice à la conversion ou à l'éclosion de
sentiments religieux. Chaque lit est dédié à un saint et il en porte l'inscription. L'utilisation de ces
écriteaux ou images pour désigner les lits d'hôpitaux et placer les malades sous la protection d'un
Saint tutélaire se maintiendra, au Québec, jusqu'à la fin du 19e siècle47.
Un autel est placé dans la salle des hommes et une église est contiguë
à la salle des femmes.
Le rituel de la messe prend dans ces salles une importance particulière: l'architecture est au service
de la religion, car l'on souhaite que de son lit, chaque malade puisse voir et participer à l'office. La
mission de soigner le corps et assurer le salut de l'âme prend ici tout son sens.
L'Hôtel-Dieu de Québec a joué un rôle important en Nouvelle-France. Des dizaines de milliers de
malades ont été admis et secourus. Cadre de traitement du corps malade, l'Hôtel-Dieu a également
servi à propager efficacement la doctrine catholique puisque le corps sert alors en quelque sorte de
prétexte pour rejoindre l'âme.
Rénald Lessard
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1. Jean Imbert, Histoire des Hôpitaux en France, Paris, Privat, 1982, p. 167.
2. Robert Lahaise, « L'Hôtel-Dieu du Vieux-Montréal », dans Michel Allard, Robert Lahaise, Edouard
Desjardins et al., L'Hôtel-Dieu de Montréal (1642-1973), Montréal, Hurtubise HMH, 1973, p. 13-19; Robert
Lahaise, Les édifices conventuels du Vieux Montréal. Aspects ethno-historiques, Ville LaSalle, Hurtubise HMH,
1980, p. 29-35.
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