Page 34 - Dictionnaire Généalogique des Familles Canadiennes - Volume I
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porte l'identilé du nom et de ]a personne. La res- répandre la clarté, par la facilité avec laquelle elles
admettent, je dirai presque, elles provoquent les
semblance de noms rapprocha cens que, dans la
erreurs. On ne s'est pas ce qu'on prépare de sou-
société séparait un intervalle immense. Le baron
cis à son enfant, en multipliant ses prénoms.
le plus puissant, le serf le plus abject, deux enne- Qu'il en omette un, ou qu'il intervertisse leur
ordre dans l'acte le plus simple (et combien de fois
mis irréconciliables, réiiondaient à la même dési- cela est-il arrivé par l'inadvertance d'un copiste I)
gnation, et près du même Dieu, invoquaient le que de nullités s'ensuivront jusqu'à ce qu'on ait
reconnu l'erreur, et alors que de formalités pour
môme intercesseur. Plus d'une fois, peut-être, cette la réparer! Des discussions pénibles, des retards
interminables, dans toutes les transactions de la
communauté de nom, celte sorte de fraternité tou-
vie civile, et même des procès graves, des pertes
cha ces âmes altières et haineuses plus d'une
; considérables de fortunes, n'ont souvent pas eu
fois elle diminua les distances créés par le ressen- d'autre origine.
timent ou l'orgueil entre des hommes qne la mort
devait si tôt réunir dans une pai-^c et une égalité
éternelles. Si telle fut son influence, la piété avait
atteint son but : elle tendit à édifier les hommes,
à les sanctifier, et ne s'inquiétait pas si, dans la n.
vie sociale, les nouveaux noms remplissaient bien
ou mal les futictions de signes distinctifs. SVSTltME DES NOMS DE FAMILLE.
Dans la mullilude infinie des noms de saints, il
n'y en a qu'un nombre assez borné dont on f.isse Les noms de familles ou les noms proprks n'ont
un usage assez habituel. Leur continuelle répéti-
lion exposa do bonne heure à confondre les indi- pas eu leur existence avec les premières races.
vidus ilaus une même classe comme dans les Suivant une hypothèse assez commune l'ori-
gine de la plupart des noms fie famille en France
classes les plus éloignées. Jugeons de l'excès où
ne daterait que du Xllème siècle.
pouvait arriver la confusion parce qui se passa en Mais quelque variées que semblent les circons-
i-ilhuanie en 1387. Ladislas Jagellon, duo de tances qui déterminèrent l'invention des noms,
Lithuanie, devenu chrétien et roi do Pologne, per-
suada à ses anciens sujets d'abjwer, à son exemple, leurs résultats cependant furent bornés, eu égard
au nombre des personnes que l'on avait besoin
leur croyance nationale. Les grands, les guerriers
furent baptisés séparément mais on divisa en de désigner.
; Que faire pour distinguer deux personnes qui
plusieurs troupes la multitude. Les prêtres baiili- portent le même nom '!
C'est de donner un surnom. 'Voilà le moyen de
saient à la fois une troupe entière, et conféraient
distinction cherché. Et quoi que l'invention de
le même nom à tous les individus qu'elle renfer- l'un, découlant des mêmes sources que celle de
mait, dans la première, tous les hommes furent l'autre, soit également bornée et qu'un surnom
appelés Pierre, et toutes les femmes Catherine
;
dans la seconde, Paul et Marguerite, etc. Il était
dilTicile que chacun de ces nouveaux chrétiens puisse appartenir à plus d'une personne, telle est
toutefois la multiplication des combinaisons binai-
n'ajoutât pas quelque désignation particulière au
res, que le même nom devra s'unir bien rarement
nom qu'on venait de lui donner, et cette nouvelle au même surnom ])ourdeux personnes différentes.
dénomination forma le nom de famille.
La pluralités des noms de baptêmes est née, Le surnom le plus simple le plus naturel, celui
sans doute, de l'espoir pieux de multiplier ses in- qu'on retrouve chez presque tous les peuples se
tercesseurs auprès du Tout-Puissant, espoir encou- forme en joignant, au nom du fils, celui du père.
ragé |iar l'Eglise, qui approuve l'usage d'ajouter Ainsi chez les Hébreux disait-on Isaac fils
aux noms de baptêmes de nouveaux noms, lors- (l'Abraham, Joseph fils de Jacob, etc.
qu'on reçoit le sacrement de Confirmai ion. Ce- Les langues d'origine teutonne ajoutent le mot
liendant,' bien que dans l'acte religieux du nomson (fils) a|)rès le du père. Delà tant de noms
baptême, on laisse à la dévotion toute la latitude de famille Suédois, Danois, Allemands Anglais,
qu'elle réclame, que Ton ne diminue rien à la (jui alFectent cette terminaison, tels que, Fergus-
condescendance due aux désirs d'un père, d'une son, Owenson, Paterson.
mère, d'un parrain, d'une marraine, d'un ami ou En Angleterre l'addition d'un s final au nom
d'un protecteur, il serait à souhaiter que, dans paternel suffit pour transformer en surnoms, puis
en noms propres ou de famille des prénoms chré-
l'acte qui, aux yeux de la société, constate la
naissance et devient la base de l'Etat civil, on tiens: Pelcr's, Williams, Richards, littéralement,
n'inséra qu'un seul nom, tellement choisi qu'il ne fils tle Pierre, de Guillaume, etc.
fût celui d'aucune autre personne de la famille. ( I En Espagne, c'est la syllabe Ez qui fait cette
)
transformation : Henriquez, Lopes, Fernandez, fils
Alors, le prénom, rendu à sa destination véritable,
distinguerait d'abord ceux que réunit la commu- d'Henri, de Loup, de Fernand.
nauté du nom de familles. C'est peu que l'usage C'est très probablement de la même manière,
c'est-à-dire, en mettant le nom paternel au géni-
contraire surcharge la langue essentiellement
tif que d'André, De Pierre, De Jean, sont devenus
concise de noms propres, ces combinaisons variées
que l'on considérait d'abord comme un moyen en Frarfce, des noms de famille.
distinctif, portent les ténèbres où elles devraient Dans le pays de Galles, le signe de la filiation
a formé les surnoms qui, plus tard, sont devenus
(I) L'on a en Canada de fréquents exemples de famille, héréditaires.
où tous les enfants portent le même nom de baptême. Ainsi,
Placé entre deux noms le mot ap (de) exprime
dans une famille composée de seize enfants, tous, filles et gar- la descendance Rhys ap Evan. Rhys (fils) de
çons, portent le nom de Louis ou Louise, et le seizième est
plus souvent désigné par le nom de Louis XVI que par son Evan. L'usage a fait disparaître la voyelle ; on a
nom de famille.
dit Rhys-Becan et l'on a formé, suivant la même